Mise en garde et recommandations contre la nouvelle menace des myiases à Wohlfahrtia magnifica, en élevage ovins

Les myiases constituent une parasitose entraînant pertes, coûts de traitements et temps passé aux soins importants. Alors que Wohlfahrtia magnifica se développait en altitude, des cas sont désormais observés régulièrement dans les plaines du Limousin à 200m d’altitude et constitue une nouvelle menace. Aucun cas n’a pour l’instant était observé dans le Grand-Est mais la vigilance est de mise, notamment en cas d’achat d’animaux provenant des secteurs touchés.

Extension des myiases à Wohlfahrtia magnifica dans la plaine du Limousin

En France chez les ovins, les myiases sont provoquées par deux types de mouches : Lucilia sericata qui sont observés dans les zones de plaines (celle de notre région) et Wohlfahrtia magnifica en altitude, au-dessus de 800m.

Depuis 2012, les myiases à Wohlfahrtia magnifica apparaissent de façon récurrente et se développent de façon importante dans les départements moutonniers du nord de la Nouvelle-Aquitaine. D’abord localisées en Charente et dans la Vienne, elles touchent également depuis 2016 la Haute-Vienne. A l’automne 2019, des cas ponctuels auraient également été identifiés, entre autres, dans les départements de l’Indre et des Deux-Sèvres. Ces localisations géographiques à moins de 200 m d’altitude sont une nouveauté en France où Wohlfahrtia était exclusivement décrite depuis la fin des années 80 dans les massifs montagneux à plus de 800 mètres d’altitude.

Cette pathologie s’étend pour plusieurs raisons synergiques : réchauffement climatique, développement du plein air, agrandissement des troupeaux, difficultés de surveillance, mouvements des animaux (achats, estives, …)…

Zone concernée par la nouvelle forme de Wohlfahrtia en 2019

Wohlfahrtia magnifica pond dans les orifices, plaies et pieds

Wohlfahrtia magnifica est une mouche de 8 à 15 mm, d’une couleur métallique “magnifique” à l’origine de son nom, avec un thorax rayé noir et blanc et un abdomen à taches régulières blanches et noires. Elle est active de la mi-mai à fin octobre suivant les conditions climatiques. Elle apprécie un climat chaud et sec. La mouche adulte est très peu visible auprès des animaux et dans les bâtiments fermés. Elle dépose directement ses larves L1 sur un animal vivant, préférentiellement les ovins, mais des cas sont également observés sur des bovins et secondairement sur des équins, porcins, caprins ou encore canins. Le cycle larvaire comporte 3 stades et dure en totalité entre 15 et 20 jours. La dernière partie du cycle a lieu dans le sol d’où émerge la mouche.

La mouche Wohlfahrtia magnifica recherche les zones délainées humides et les zones cutanées abimées pour la ponte : vulve et pieds principalement, mais aussi conduit auditif ou au niveau de plaies (de bouclage, suite de bagarre entre béliers, piétin, nombril… ou écornage pour les bovins). Les périodes où les femelles présentent des écoulements vaginaux sont particulièrement à risque et ce d’autant plus que l’éleveur pratique des coupes de queue courtes. Les larves mesurent entre 1 cm /1,5 cm et sont tassées les unes sur les autres. Elles s’enfoncent très profondément dans les tissus et sont très difficiles à extraire, même à la pince à épiler. C’est une des particularités de cette espèce.

Les myiases classiquement observées dans notre région sont celles de la mouche Lucilia sericata et peuvent également se trouver sur les cadavres, contrairement à Wohlfahrtia qui ne pond que sur des tissus vivants. Les larves de Lucilia sericata se localisent plutôt dans la laine, principalement sur le dos et le tronc, sous les zones laineuses humides ou souillées, ou dans l’espace interdigité (piétin).

Larves de Wohlfahrtia magnifica, dans l’espace interdigité du pied avant d’une brebis

Conséquences et soins lourds pour les animaux atteints

Au sein d’un cheptel, le nombre d’animaux atteints est variable et peut aller de quelques-uns jusqu’à 30%. Fixées profondément dans les chaires, les myiases Wohlfahrtia provoquent des douleurs et démangeaisons intenses pour l’animal infesté, et conduisent à une perte d’appétit (brebis creuse), un isolement, des boiteries, des surinfections, un refus de saillie… Les conséquences sont catastrophiques pour la santé et le bien-être des animaux et des éleveurs. Le temps à soigner les animaux est considérable et la perte de production importante.

L’animal atteint doit être rapidement isolé et soigné. Le vétérinaire doit être prévenu afin de mettre en place avec lui et le plus rapidement possible les soins adaptés pour prendre en charge la douleur et soulager l’animal d’une part et soigner la plaie, limiter la surinfection et éviter un nouveau dépôt de larves d’autre part. Les larves restantes après application de l’insecticide adapté doivent être retirées une à une et détruites. Elles pourraient en effet continuer leur cycle en faisant leur pupaison sous terre.

En zone à risque, la prévention se base d’abord sur la maitrise, tout au long de l’année, des facteurs de risque liés à la conduite d’élevage et aux soins, et ensuite sur la protection corporelle pendant la période à risque de mi-mai à fin octobre. La maitrise des affections du pieds, les soins des plaies et leur cicatrisation rapide ainsi que l’hygiène lors de la pose des boucles auriculaires sont déterminants. Le protocole de soins préventifs sur les ovins adultes doit ensuite être décidé avec le vétérinaire.

Vigilance accrue lors des achats d’animaux issus d’une zone à risque

Des mesures particulières de prévention doivent être prises en cas d’achat d’animaux dans les zones concernées par la nouvelle forme de Wohlfahrtia (cf. carte ci-dessus). Les animaux introduits doivent être isolés en bâtiment fermé, surveillés et soigneusement inspectés notamment au niveau des orifices et entre les onglons. Suivant les situations, un traitement protecteur peut être appliqué. Ces mesures de précaution sont également applicables après rassemblement d’animaux en période estivale dans les secteurs connus à risque.

Enfin, chaque éleveur est appelé à la plus grande vigilance et à signaler à son vétérinaire ou GDS toute suspicion.

Le réseau national des GDS et des vétérinaires ainsi que l’ensemble de l’interprofession sont alertés afin de lutter collectivement contre l’extension de cette nouvelle menace.

Retrouvez plus d’informations sur le site internet du GDS et n’hésitez pas à nous contacter.

Le GDS, le 24/04/2020 (article paru dans Le Paysan Lorrain)

Quand suspecter les myiases Wohlfahrtia ?

Lorsque j’observe une ou des larve(s) blanche(s) difficiles à retirer (quand je tire dessus à la pince) au niveau de l’espace interdigité du pied, d’une plaie ou à l’intérieur d’un orifice : vulve, prépuce, conduit auriculaire…

Que faire en cas de suspicion ?

→    Je contacte mon GDS et mon vétérinaire

→    Puis je fais réaliser les prélèvements pour identifier les larves (envoyées en laboratoire)